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[MAËL] Bulgarie

Pour le mois de l’Europe, je voulais écrire quelques mots sur la Bulgarie, un pays que j’ai eu l’opportunité de visiter et qui a eu une grande importance dans mon cheminement personnel. Mais j’ai eu beaucoup de trop choses à écrire et faire des choix était trop difficile.

Alors je partage ici, sous forme d'un article, ce que j’ai appris de la Bulgarie et ce qu’elle m’a donné.


Tout commence il y a quatre ans, lorsque je pars pour un échange Erasmus+.

Me voilà plongé dans Sofia, la capitale située au pied de la chaîne du Grand Balkan, bien loin des célèbres capitales de l’Ouest européen.


Je me souviens des couloirs du métro, je ne savais pas que je venais de débarquer dans le pays des roses. Les petites boutiques étaient recouvertes du sol au plafond d’un rose très kitsch et sentaient évidemment la rose ! Dedans s'y trouvaient des objets de toutes sortes à l'effigie de la fleur.

Je me souviens aussi de l’alphabet cyrillique, pour le nom des stations de métro, les panneaux directionnels ou encore les devantures, à ce moment j’étais incapable de lire cet alphabet. J'étais évidemment un peu déboussolé de ne pas pouvoir comprendre mon environnement.


Dehors, je me souviens des célèbres pavés jaunes de Sofia, du tremblement du sol au passage des vieilles rames de tramway directement sorties du soviétisme, du tack-tack-tack-tack... des passages piétons, de l’architecture ottomane qui rencontre la stalinienne, le quartier Larguo, de la diversité des formes d’églises, des minarets…


J’étais attendu à Pazardjik (Пазарджик), alors je n’ai fait qu’une visite extrêmement rapide de Sofia.


Je me souviens très bien de cette visite. Ce qui m’a vraiment marqué, c'était l’histoire familiale brisée de la guide.


En effet la Bulgarie a été, juste après la Seconde Guerre mondiale, un État satellite de l’URSS, où la dictature était très violente. Si cette étape historique donne à la Bulgarie l’opportunité de faire un bond en avant en matière de modernisation notamment de son industrie technologique, il en reste que la collectivisation de l’agriculture, la nationalisation de tous les domaines et la surveillance rendent la vie quotidienne très dure.


La famille de la guide en a été un témoin. L’épuration communiste n’a épargné aucune des personnes jugées dissidentes, le grand-père paternel de cette guide a disparu du jour au lendemain, sans aucune explication, sans aucune trace, sans réponse.


Je me souviens des marqueurs historiques et culturels de cette ville carrefour.

La statue de Sainte-Sophie, la patronne de Sofia, qui remplace aujourd’hui l'ancienne statue de Lénine.

Les vestiges de l’amphithéâtre de Serdika découverts en 2004 - en plein milieu de la ville - et qui ferait presque la taille du Colisée de Rome !

Les édifices religieux des trois religions monothéistes qui se font presque face en plein cœur de Sofia…


Je dois prendre le train pour me rendre dans la ville suivante, plus à l'Est.

Le train est assez lent pour observer le paysage et constater, à la fois la beauté du paysage et la pollution de celui-ci. J’y vois beaucoup d’arbres dont le feuillage est composé de sacs plastiques, l’image me marque encore.


Je profite du trajet pour en lire davantage sur la Bulgarie.


Ce n’est un secret pour personne, c’est le pays le plus pauvre de l’Union européenne, le salaire moyen en 2016 était de 383 euros, c'est aussi le pays où la pollution y est la plus élevée. L’échange Erasmus+ est d’ailleurs sur ce sujet.


Malheureusement, la Bulgarie est aujourd’hui très souvent résumée à ses histoires de corruption. Certes on peut encore lire des articles de presse au sujet d’histoires de détournements d’argent public et notamment de fonds européens par des personnalités politiques. C’est une réalité mais ce n’est pas que ça, le pays a fait des efforts considérables à ce sujet, c’est même devenu un enjeu de taille.


En 2000, la Bulgarie et l'UE débutent des négociations en vue d'une intégration au projet européen. Les négociations reposent sur des éléments fondamentaux : la corruption, l'agriculture, le trafic d'êtres humains et évidemment la stabilité économique du pays.

La Roumanie et la Bulgarie s’engagent donc conjointement dans ce processus de négociations et de travail réformateur très dur.

En 2007, après la complétion des chapitres du processus d’adhésion, les deux États rejoignent l'Union européenne.


Aujourd'hui, des politologues considèrent cet élargissement comme le plus gros échec de l'histoire de l'intégration européenne, notamment parce que les problématiques de l'époque restent d'actualité.


D’ailleurs, en 2022 des États membres ont à nouveau brandi leurs vetos contre l'intégration de la Bulgarie à Schengen du fait de la frontière bulgaro-turque, un point de passage stratégique de la route des Balkans. La Bulgarie se retrouve une nouvelle fois sur le banc de touche.


Pour ne rien arranger la Bulgarie traverse, depuis deux ans maintenant, une crise politique majeure. Les élections législatives se succèdent (cinq en deux ans), les majorités trop faibles rendent les gouvernements instables.

De plus, le parti ultra-nationaliste prorusse prend de l'ampleur alors que la Bulgarie livre indirectement une grande quantité de munitions à l'Ukraine, un énorme bénéfice pour l’économie bulgare : 5 milliards d'euros l'an dernier.


Mais quand je suis à Pazardjik quatre ans auparavant il n’est pas encore question de ça.


Là-bas, je vis l’expérience Erasmus+, les rencontres et je côtoie les réalités de jeunesse des autres nations européennes.


Je vis les célébrations bulgares notamment la fête dédiée à Cyrille et Méthode les fondateurs du futur alphabet cyrillique, je prends conscience de l’importance des langues nationales européennes.


J’observe l’importance de la célébration en Bulgarie. Par exemple, la fête de la fin du lycée qui est un véritable événement où des sommes considérables d’argent sont dépensées : robes de soirée, bals, voitures aux carrosseries rutilantes…


Je découvre, lors de concerts, la culture musicale bulgare, parfois traditionnelle parfois plus moderne, comme la reine de la pop bulgare : Maria Ilieva.

Je goûte les spécialités culinaires, la chopska salata, le célèbre fromage sirene que l’on mange à tous les repas et les kebapche.


Les Bulgares me racontent la beauté insoupçonnée des paysages - certains sont même classés par l’UNESCO -, ils me parlent du célèbre monument Bouzloudja, ils me racontent aussi leurs vacances au bord de la mer Noire, la vie cachée des minorités LGBTI+, les enjeux liées aux minorités turques et roms…


Pendant une journée, je vais visiter Plovdiv, deuxième ville du pays, capitale européenne de la culture 2019 et la plus vieille ville d'Europe habitée de manière continue. Plovdiv est une ville étonnante, encastrée comme Rome, entre sept collines. Les architectures byzantine et thrace et leurs vestiges s'entremêlent. Son amphithéâtre hissé en son sommet la rend unique et incontournable si l'on se rend vers la mer Noire.


C'était ma première rencontre avec les Balkans et le début de ma fascination pour cette péninsule européenne.


Je ne prétend pas avoir découvert toute la Bulgarie et la connaître parfaitement, je n'ai pas vu Varna, je ne suis pas allé voir les stations balnéaires… d’ailleurs qui connaît parfaitement un pays ?

Je crois surtout que le peu que j’ai découvert m’a vraiment aidé à comprendre l’importance de la coopération européenne, la nécessité de dialoguer et de se connaître entre voisins.


Bref, j'en suis certain, la Bulgarie n'est pas un État de seconde zone, bien au contraire.


Une expérience comme celle-ci m’a donné l’opportunité de vivre pleinement ma citoyenneté européenne : j’ai traversé des frontières, j’ai pu débattre librement avec d'autres citoyennes et citoyens et pour clôturer le tout, j'ai pu voter.


En effet, mon retour de Bulgarie a eu lieu le 26 mai 2019, le jour des dernières élections européennes.


Grâce à cette expérience, aux nouvelles connaissances acquises, aux discussions de plusieurs heures avec d’autres Européens, j’avais à l’esprit une multitude de choses et de problématiques :

  • Comment est-ce que les enfants de la guerre de Yougoslavie grandissent et se construisent ?

  • Comment la jeunesse polonaise considère la problématique énergétique, comment vit-on en Pologne lorsque l’on est issu d’une minorité ?

  • Comment est-ce que les Espagnols vivent avec cette image de pays où l’on ne fait que la fête ?

  • Comment la jeunesse roumaine s'engage contre la corruption ?

Après tout cela je me sentais prêt à voter et surtout, en tout état de cause.

Je crois que c’est la seule élection où j’ai voté tout en sachant ce pour quoi je votais et ce que je voulais voir advenir par ce choix.

C’est même la seule élection où je n’ai eu aucun regret et aucune déception.


Alors quand j’observe le début des discussions de certains membres des partis politiques français qui ne réfléchissent qu’à l’échelle française et qui ne se présentent que pour eux-mêmes et sauver leurs fesses, cela me hérisse le poil.;.


Les enjeux climatiques et sociétaux font qu’il faut s’élever et penser global, penser européen. La France seule n'est pas grand chose, les derniers événements géopolitiques l'ont démontré.


Alors qu’une France européenne qui avance avec ses voisins à toutes ses chances de promettre et de prétendre à un avenir meilleur.


Il ne reste qu’un an pour parler Union européenne et Europe.


Il ne reste qu'un an pour réfléchir à un projet collectif, un projet à 447,7 millions d'Européennes et d'Européens.

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